
Gwendoline Finaz de Villaine
Biographie
Ancienne élève de la Maîtrise Radio France, Sciences Po Paris et HEC, Gwendoline Finaz de Villaine intègre la Compagnie Louret en 2003, (Les Années Twist, les Années Tube sur TF1). Elle participe à plusieurs comédies musicales dont Attention Mesdames et Messieurs avec Michel Fugain aux Folies Bergère en 2005. En 2006, elle tourne dans la série produite par France 3 Le Réveillon des Bonnes, et participe au grand prix Claude Lemesle de la Sacem. En 2008, elle enregistre des titres en tant qu’auteur-compositeur à Londres. Suivront des collaborations avec Elie Chouraqui, Tristan Duval (Les Opéras en plein air), des concerts au Zèbre à Paris et au Divan du Monde. Parallèlement, Gwendoline se passionne pour l’écriture et se lance dans la rédaction du roman, Les Brumes de Grandville. Elle y trouve des résonances avec son métier de chanteuse et de compositeur, avouant pouvoir y mêler ses passions avec une liberté inédite. Son premier roman est parsemé d’influences autobiographiques, mélange de ses expériences de scène et des rencontres humaines qui ont jalonné sa vie.
Interview
1. Vous évoluez dans le milieu musical, qu’est-ce qui vous a poussé à vous tourner vers la littérature jeune adulte ?
J’écris et compose des chansons depuis des années, et j’ai toujours adoré la littérature. J’ai eu envie de raconter l’histoire d’amour que j’aurais voulu lire à quinze ans. Je me souviens de ce qu’avait provoqué en moi, à cette époque, la découverte d’Autant en emporte le Vent, de Jane Eyre et de la série Catherine, de Juliette Benzoni : des moments inoubliables d’évasion, des débats sans fin avec mes amies et des relectures compulsives par la suite ! J’aimais aussi le côté intergénérationnel de la lecture : je pouvais partager le destin de ces femmes fortes avec ma mère et ma grand-mère. Le point de départ des Brumes est un peu rocambolesque : je travaillais sur un projet de comédie musicale, lorsqu’il m’a été donné de rencontrer, par l’intermédiaire d’amis communs, une femme médium. Jamais auparavant je n’avais vécu ce genre d’expérience, ni même été attirée par cet univers. Elle m’a fait part de détails troublants sur mon passé, puis, au terme de notre échange, a fini par conclure : « D’ailleurs, vous allez écrire sur nous ». J’ai répondu : « Sur vous ? ». Elle a acquiescé : « Oui, nous, les entités, les esprits ». Et un an après, c’est ce qui s’est passé avec les Brumes ! J’ai commencé à écrire l’histoire en juillet 2013. De retour de vacances, en septembre, j’ai relu la première trame, et tandis que je comptais m’atteler à autre chose, j’ai aimé ce que je lisais, donc j’ai continué. J’ai achevé la première version en décembre.
2. L’histoire se déroule en 1919, pourquoi avoir fait le choix de situer l’action à cette période ?
Je trouve que c’est une période fascinante, ce moment où le monde se réveille d’un véritable cauchemar, saigné à blanc, sonné par quatre années de ruine. Une période d’une extrême violence, où, paradoxalement, les gens ont envie de vivre plus fort que jamais, de profiter de la paix retrouvée. Quelle époque pouvait être plus propice à écrire une histoire de fantôme, que l’année 1919, hantée par le souvenir de ceux qui sont morts au front ? Pour moi, la frontière entre le fantastique et le réel n’est jamais aussi ténue que pendant les périodes de guerre : le rapport à la mort n’est pas le même, les miracles existent, les gens se surpassent de manière irrationnelle dans certains cas. Par ailleurs, la fin de la guerre ouvre une ère extraordinaire : les Années Folles. Dix années d’explosion culturelle, de folie, de créativité, d’insouciance et de légèreté, d’émancipation de la femme. J’avais envie de me plonger au cœur des sensations de cette époque, de l’ivresse de la jeunesse, de la musique, des odeurs, des parfums, de la texture même des tissus… Une époque très différente de la nôtre, dotée d’un instinct de vie hors du commun, malgré les privations et la pauvreté qui touchent la plupart des familles. Un période inspirante, une ère de reconstruction, qui me fait rêver.
3. Vous retrouvez-vous dans les traits de votre héroïne ?
Les Brumes sont une fiction, néanmoins très inspirée de mon expérience personnelle : ce n’est pas simplement une histoire d’amour entre une chanteuse et un aristocrate fantôme ; il y a aussi un sujet qui me tient à cœur, et qui est celui de la différenciation sociale. Même si au lendemain de 14-18, le monde connaît un bouleversement sans précédent, l’esprit de caste demeure. Apollonie est jeune, romantique et naïve. Elle va très vite apprendre à se positionner entre le monde des domestiques et celui de ses employeurs, les Montfaucon. En tant que chanteuse, j’ai connu le mélange de curiosité et de méfiance que ce métier suscite dans certains milieux. Apollonie croit que son statut d’artiste la place en marge des luttes de classe. En cela, nous nous ressemblons. C’est aussi une grande amoureuse, qui place sa passion pour Hector au-dessus de tout le reste. À partir de là, peu lui importe les mesquineries sociales, elle suit son cœur et ses intuitions. Je crois comme elle aux vertus du courage, de l’éducation et de l’amour, contre l’ignorance et les préjugés.
4. Vous êtes également auteur, compositeur du single « Mort ou vivant » qui met en scène « Les Brumes de Grandville ». Qu’avez-vous ressenti pendant le tournage du clip ? Quelle sensation éprouve-t-on lorsque l’on rencontre des personnages issus de son imagination ?
J’ai la chance de travailler avec une maison d’édition de grande qualité, B. Éditions, qui a compris mon univers et la diversité des choses qui me passionnent. D’où l’idée de tourner un clip, au château de Courson, illustrant la sortie des Brumes. J’ai été très émue de découvrir, le jour du tournage, le visage de mes héros, de voir vivre sous mes yeux Apollonie et Hector. J’ai eu l’impression d’assister à une naissance : soudain, chacun pouvait se projeter en eux, ils ne m’appartenaient plus tout à fait. C’était extrêmement troublant. Cette expérience m’a procurée beaucoup de joie ; j’espère vous communiquer celle-ci à travers la lecture de l’ouvrage, comme j’ai eu plaisir à l’écrire.